Louis Winsberg y Jaleo

Publié le

Jaleo 2009 :

Louis Winsberg
Miguel Sanchez
Sabrina Romero
Jean-Christophe Maillard

Ils étaient pour 3 soirs au Jazz Club de Dunkerque, l'occasion pour moi d'y aller pour la première fois samedi.

Jaleo, "tapage", "bordel", un monde à la croisée de tous les chemins originels du flamenco, jusqu'à la musique indienne bien sûr, et usant du jazz comme vecteur d'une approche plus généraliste.

Dans ce nouveau projet "Jaleo 2009", une formation réduite, des réminiscences indiennes moins présentes, une ouverture sur d'autres horizons métissés, reggae, rock.

Winsberg, ce n'est ni du flamenco pur, les amateurs de Paco de Lucia, de Camaron, n'y trouveront pas toujours leur comptant; ni du jazz de couleur habituelle, il est capable de mélanger dans un même morceau du flamenco, du blues, du reggae, du jazz rock ...

C'est un univers dans lequel il faut entrer, pour cela il faut en trouver la clef, laisser la musique, les sonorités, les rythmes pénétrer en soi, et on peut alors se laisser entraîner sur le chemin où l'on retrouve tout ce qui fait aimer la musique : évasion, ouverture sur un ailleurs, résonnance intérieure.

La musique de Louis Winsberg, c'est un peu l'auberge  espagnole : chacun y trouve ce qu'il y apporte, et ce qu'il a envie d'y trouver ...

Comme pour les instruments utilisés : chaque musicien joue, chante ! Louis joue de la guitare, acoustique, électrique, de la basse, du saz et chante; Jean-Christophe Maillard joue des guitares et du saz, il chante également, y compris ses propres compositions soul-rock; Miguel Sanchez joue du cajon flamenco, de la guitare (un vrai puriste de la guitare flamenca, on l'entend dans le spectacle sur un seul morceau, mais c'est un vrai régal), il chante  (magnifique voix grave et rauque, typiquement espagnole), danse ... et joue aussi du ... tabouret dunkerquois, ainsi qu'il nous en a fait la brillante démonstration ! Sabrina Romero joue du cajon, chante et danse merveilleusement.

"Saz" et "Cajon", kezako ?

Le saz est un luth d'origine turque, à long manche. Il peut comporter de 7 à 9 cordes.


Le cajon, instrument de percussion d'origine péruvienne, est une caisse de résonnance, qui peut être amplifiée, sur laquelle le joueur est assis. Il peut frapper sur le devant et sur les côtés. La particularité du cajon est de comporter un timbre, qui vibre, et ramène certaines sonorités à celles de la batterie.

Le concert
Un concert agréable, malgré des conditions particulières qui ont failli nous décourager en fin de première partie ...

Tout d'abord, le Jazz Club de Dunkerque, bien que récemment refait à neuf, et doté d'un coin bar tout à fait sympathique, souffre d'une climatisation totalement absente ... c'est une fournaise en hiver, je n'ose imaginer ce que ce doit être en été ... surtout pour les spectateurs qui se trouvent en partie haute de la salle ...

Ensuite, et il paraît que c'était la première fois, il y avait dans la salle "un fâcheux"... oh, rien de bien méchant, un admirateur bruyant et arrivé déjà très éméché avant le concert ... qui a continué à boire, et qui s'est exprimé avec force et vigueur tout au long de la première partie (un peu moins après), manifestant son enthousiasme de façon intempestive, souvent hors de propos, et dans une forme qui faisait davantage penser au cri de Mario dans le jeu Mario Kart, qu'à une quelconque espagnolade ... ! Vous savez, le "i-ia" du célèbre moustachu ! Résultat : une bonne heure passée complètement crispés à attendre la prochaine offensive du fâcheux ... ça gâche fortement le spectacle ... Comme c'était la première fois que nous mettions les pieds au jazz club, et qu'aucun responsable ne se manifestait, nous n'avons pas réagi, attendant que ça se passe ... L'entracte a permis d'identifier l'ostrogoth, la responsable a demandé qu'on ne le serve plus, puis est allée gentiment le prier de se taire,  il s'est installé juste devant la scène, ce qui a curieusement permis qu'il soit plus silencieux, il devait se sentir autorisé à parler moins fort, étant plus proche de son idole ... ce qui ne l'a pas empêché de manifester sa joie par une gestuelle approximative qui l'a plus d'une fois vu sur le point de s'écrouler sur les amplis, mais bon ... Les aléas du public ... Il a su prouver hier soir que le "jaleo" pouvait aussi être flamand !

Enfin, peut-être le temps de "la mise en doigts", mais la première partie  spectable s'est révélée un peu poussive ... Louis Winsberg avait parfois les doigts "collés au manche" ... et la chanteuse se tenait pudiquement assise, ne s'est pas levée une fois pour danser ... On était un peu sur notre faim ... et je sentais que mon accompagnateur, puriste du flamenco, partait dans des comparaisons qui me semblaient certes inappropriées en ce qu'il s'agissait malgré tout d'un spectacle de jazz, mais qui ne parlaient pas en faveur des impétrants ... !

Par contre, dès le début de la seconde partie, tout s'est réveillé, sur scène et dans la salle, et on a véritablement pu comprendre ce que "jaleo" signifiait ! Merveilleuse interprétation à la guitare de Miguel Sanchez; des pas de danse flamenca de Sabrina Romero : impossible de distinguer le travail répété de l'improvisation, une totale osmose entre elle et Miguel le percussionniste au cajon, la possibilité pour la danseuse de s'exprimer dans l'émotion instinctive du rythme et de la sonorité. Du bel art.

Une ouverture sur d'autres mondes musicaux, avec le caribéen Jean-Christophe Maillard, qui osa quelques incursions vers le reggae, le rock, le blues ...

Et un duo particulièrement époustouflant qui l'a uni à Louis dans un morceau qui ne figure pas sur leur dernier disque, ayant été malencontreusement effacé après enregistrement. L'occasion de les retrouver au saz dans "Saz y saz" dont je vous ai déniché une vidéo qui vous fera regretter de ne pas avoir assisté au concert. Attention, prenez le temps d'entrer dans le morceau, il faut le mériter, il ne se laisse pas pénétrer d'une oreille distraite !

Enfin, en coda du concert, une libre interprétation de leur vision de l'Amérique (de Bush), sur une reprise du thème de Leonard Bernstein "I like to be in America", après que Louis nous eût brillamment fait la démonstration que, pour cette réunion de "latinos", l'auteur s'était directement inspiré de la rythmique flamenca, Miguel Sanchez livrait une nouvelle facette de ses talents : cajon, chant et esquisse de pas de danse. Un régal.

Trois heures de spectacle, à la rencontre d'un monde musical étonnant, foisonnant et peu commun.
Je retournerai au jazz club, assurément, quand Louis Winsberg y reviendra, et sans doute avant. L'occasion de rencontrer une programmation audacieuse, qui sort des sentiers battus du jazz, et qui réunit quelques afficionados dans une ambiance bon enfant et intimiste bien agréable.

Merci à Françoise Devienne et à son époux.
Et à Didier de m'avoir plusieurs fois incitée à pousser la porte. Il a bien fait !

 



Découvrez Louis Winsberg!



Quelques vidéos
Sacromonte, morceau issu du premier Jaleo (2001), avec Sabrina Romero dans la dernière minute de la vidéo (filmé à l'automne 2008)


Saz y Saz, Louis Winsberg et Jean-Christophe Maillard



Issus d'un autre spectacle avec son groupe, quelques pas de danse de Sabrina Romero

Publié dans Musique

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
J
J'ajoute: JALEO c'est ça: http://www.youtube.com/watch?v=G6najG-abX8&feature=relatedDes enfats qui jouent, comme sur la place abatucci de mon enfance avec ceux qui, plus tard ont fat la sérénade à mon pauvre père.Il y a effctivement eu un vrai moment de JALEOdans ce spectacle pendant lequel je n'ai plus entendu super Mario!
Répondre
J
Partir du Flamenco classique « solea » avec des doigts déliés sur bois du manche<br /> http://www.youtube.com/watch?v=RYkz30RL_GU&feature=related<br />  <br /> Passer par la « buleria » avec palmas et chanteur assis<br /> http://www.youtube.com/watch?v=VKtAhJPZS6o&feature=related<br />  <br /> Finir en « jam session »<br /> http://www.youtube.com/watch?v=9cadbYIzhqQ&feature=related<br />  <br /> D’autres l’ont fait.<br />  <br /> Sans Saz, certes, mais si l’influence caraïbe était loin de me choquer chez JALEO qui a commencé par un fandango à son père, poursuivi par des bulerias d’un grand classicisme et terminé en JALEO,  il est clair que les «YI-HAA » de super Mario ont fait que tant qu’il était derrière moi (première partie) je n’ai pas réellement profité !<br />  <br /> JL
Répondre
D
Ah! les bons vieux souvenirs...Ce club a été élu meilleur club de jazz de province par les musiciens. Il est vrai qu'is y sont reçus par Françoise, Jean et l'équipe de bénévoles comme des rois, à la manière chaleureuse des Dunkerquois. C'était pourtant avant le déménagement dans les nouveaux locaux, inaugurés par Jaleo Ier, une salle plus chaleureuse avec une sonorité magnifique, une salle que les musiciens définissent comme superbe. Cependant, il faut venir tôt pour être au rez-de-chaussée et composer, comme partout, avec d'éventuels spectateurs zétranges.Comme l'audience a beucoup progressé grâce au bouche à oreille, il faut en effet parfois être acrobate pour atteindre le bar mais quel plaisir d'être dans cette salle si intimiste, si proche des artistes avec lesquels on peut partager quelques minutes pendant l'entracte.     Et puis, il y a ces moments uniques pour les amateurs: les master classes pour les jeunes musiciens et pour les scolaires (inoubliable Henri Texier!) et les jam sessions.
Répondre